PAYSAN BRETON 27 OCTOBRE 2011
Le poids lourd qui leur a servi à remonter en Bretagne chevaux, poneys, poules et chiens ne s’y est pas trompé. C’est à l’issue de son septième et dernier voyage de déménagement entre Dax et Pouldreuzic que le camion a rendu l’âme. Comme s’il avait senti, en cet été 2008, que ses propriétaires et leurs animaux étaient enfin arrivés à bon port… Anne Roche et Sébastien Rétoret sont des amoureux des chevaux. Et c’est d’ailleurs grâce à cette passion commune que ces deux moniteurs se rencontrent dans un centre équestre du Finistère Sud, dans les années 90. « Nous partageons la même approche des animaux et de l’enseignement » : celle de l’équitation éthologique et comportementale. Une façon de faire et d’être très respectueuse de l’animal, toute en douceur, popularisée notamment par le film « L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux »
Après diverses expériences professionnelles en région parisienne, en Haute Savoie et dans le Sud-Ouest, le couple, qui entre temps s’est aguerri à la gestion d’un centre équestre, cherche à revenir en Bretagne. Et à créer sa propre structure afin de mettre en pratique ses convictions et son savoir. L’opportunité se présente en 2008, sous la forme d’une ancienne exploitation maraîchère de 11 hectares, à Kerintec, sur la commune de Pouldreuzic. « Nous n’avions pas les moyens de racheter un centre équestre déjà existant. Là, c’était une bonne solution avec une maison attenante, des terres pour les chevaux… »
Bien-être
Anne et Sébastien peaufinent la présentation de ce projet qui mûrit dans leurs têtes depuis si longtemps, et sollicitent le Crédit Mutuel de Bretagne pour les accompagner. L’accord de leur partenaire bancaire obtenu, les opérations peuvent débuter. « Tout était à faire. Les terres étaient en herbe, il fallait clôturer les pâtures, fabriquer les abris, créer une carrière… » Pas de quoi effrayer le couple qui va réaliser pratiquement tous les amé- nagements lui-même. Et début 2009, dans ce pays bigouden qui est aussi celui du Cheval d’orgueil, ouvre l’une des premières structures bretonnes spécialisées en équitation éthologique : Esprit Cheval. Un nom en forme de manifeste !
« Nous avons toute une gamme de prestations, explique Anne. A commencer par l’écurie de proprié- taires ». Leitmotiv : le bien-être
« Les chevaux sont au moins deux par pré, sur de grandes parcelles clôturées en rubans, avec des abris ! » Au menu, pour les pensionnaires choyés, de la nourriture traditionnelle, des fruits de saison issus du verger, etc. Côté infrastructures : une carrière éclairée (60 m par 20 m), un rond de longe (18 m), des boxes… Sans oublier les nombreux sentiers de balades et de randonnées (Equibreizh…) accessibles depuis l’exploitation.
Autre facette de l’activité : le travail des équidés, selon la méthode éthologique. « Cela va du débourrage à l’éducation des chevaux ayant des problèmes de comportement. Dans ce cas, nous travaillons souvent avec les proprié- taires car c’est le couple homme/cheval qui est à considé- rer. Nous avons aussi des proprié- taires n’ayant pas de difficultés particulières avec leur animal mais qui ont tout simplement envie d’une autre approche de l’équitation, d’être en osmose avec leur cheval ». Dernier volet, l’enseignement. « Le mercredi, toutes les 2 semaines, nous organisons un atelier « petits », destinés aux enfants de 6 à 12 ans. Sur des poneys, nous leur faisons découvrir notre manière d’aborder l’équitation. Il n’y a pas que du travail monté, ils apprennent aussi à connaître l’animal, à le lire… et l’on constate que les enfants sont très instinctifs, très ouverts ». Pour les adolescents et les adultes, Esprit Cheval propose des cours particuliers ou collectifs par petits groupes, des stages, et beaucoup de « sur mesure ».
« A l’avenir, nous aimerions également développer le travail sur l’humain par le bais du cheval. Nous avons déjà collaboré avec des centres hospitaliers et des hôpitaux de jour pour des publics de schizophrènes, d’autistes. Les chevaux sont sans préjugés. Cela libère souvent les gens qui osent alors davantage ».
Une diversification épicée
Dans une logique de diversification, Anne et Sébastien se sont parallèlement lancés dans une culture atypique : le safran. Après deux saisons d’essais sur une centaine de bulbes, ils sont passés cette année à la vitesse supérieure. Au mois de juillet, quelque 15 000 bulbes ont été plantés sur une parcelle de 900 m². « C’est une culture qui se combine bien avec notre activité. Durant l’année, cela ne demande pas beaucoup de temps, à l’exception du mois d’octobre. Lors de la floraison, il faut récolter chaque jour car la durée de vie de la fleur est de seulement 24 heures ». Ensuite, les stigmates sont délicatement prélevés, séchés puis conditionnés. A noter que le safran français figure parmi les plus réputés au monde. En production biologique, son prix au gramme est compris entre 30 et 35 €.
« Cette année, nous avons surtout cherché à acclimater nos bulbes et à faire connaître notre production ». Pour la commercialisation, les débouchés ne manquent pas : marchés du terroir, vente directe, internet… A terme, le couple envisage de proposer à la vente aux particuliers des bulbes « bio ». Une certitude : avec Esprit Cheval et sa petite sœur Esprit Safran, Anne Roche et Sébastien Rétoret ont l’intention d’écrire leur propre histoire. Et elle sera hippique et pleine de saveurs.
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